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1959

YB EN DEMI-FINALES DE LA COUPE DES CLUBS CHAMPIONS

Lorsque Albert Sing a pris en mains les Young Boys, personne ne se doutait que les «Jaune-et-Noir» bernois allaient remporter 4 titres de champion d’affilée (1957 à 60) et jouer les demi-finales de la Coupe des Clubs Champions. Leur célèbre stade du Wankdorf a vécu des années 50 dorées. Sing était un entraîneur très exigeant - ce qui lui avait valu le sobriquet du public «Der eiserne Schwabe» (l’Allemand de fer), alors que les joueurs l’appelaient «Le Vieux».

Outre ses 4 titres consécutifs de 1957 à 1960, YB comptabilisait 2 victoires en Coupe de Suisse. En 1958, le BSC Young Boys (BSC = Berner Sport Club) fêtait dignement son 60e anniversaire en remportant le doublé coupe/championnat.

Albert Sing a entraîné l’équipe une éternité: de 1951 à 1964, au début comme entraîneur-joueur! Les exploits de son gardien Walter Eich, toujours avec son solide doublon fribourgeois, Michel Ansermet, restent en nos mémoires. Comme un attaquant venu de Schaffhouse – équipe, dont les couleurs sont également le jaune-et-noir: Eugen «Geni» Meier, réputé pour ses puissants tirs, qui lui ont valu le sobriquet de «Bomben-Meier». A l’aile droite, on retrouvait Toni Allemann – celui qui qualifiera la Suisse pour la Coupe du Monde 1966, au détriment des Pays-Bas de Johan Cruyff - et à la régie l’Allemand Ernst Wechselberger. Sans oublier les «rocs» en défense qu’étaient Willy Steffen et Heinz Schneiter ou les infatigables demis, Schnider, «Niggi» Zahnd et Heinz Bigler.

Les performances des Young Boys méritent le respect. En 1958, pour leur première Coupe d’Europe des clubs champions, les Young Boys n’avaient pas été soutenus par le monde politique suisse, qui voulait que le champion de Suisse boycotte le prestigieux Vasas Budapest, champion de Hongrie, un an exactement après l’insurrection de Budapest, écrasée par les communistes magyars, avec l’aide des Soviétiques: plus de 3000 morts.

Le club, la Ligue et l’Association se sont battus pour ne pas en arriver au boycott. Le conseil communal de la ville de Berne interdisait, cependant, formellement à YB de recevoir les Hongrois au Wankdorf, le 31 octobre 1957. Le club négocia avec Stuttgart, qui refusa, pour obtenir finalement l’accord de la ville de Genève (1-1)! Au retour, Vasas passa la rampe (2-1), mais échouera en demi-finales contre le tenant du titre et futur vainqueur, le Real Madrid.

L’année suivante, ce sont les Young Boys, qui allaient en demi-finales! 1958/59 était leur meilleure saison. Tout avait pourtant mal commencé: YB aurait dû affronter le grand Manchester United, le 26 août 1958, à Old Trafford, le 3 septembre à Berne. ManU avait été frappé par la tragédie aérienne de Munich six mois plus tôt: 23 morts, dont 8 joueurs. Parmi les 21 survivants, les futurs champions du monde 1966, les frères Bobby et Jacky Charlton, ainsi que le manager Matt Busby. Sans oublier Harry Gregg, le gardien de but. Le Nord-Irlandais avait extirpé de la carcasse de l’avion plusieurs équipiers, et surtout sauvé une femme enceinte et sa fillette. Harry Gregg, considéré comme l'un des meilleurs gardiens de l'histoire du club de Manchester, vient, lui, de mourir, assez exactement 64 ans plus tard, le 16 février 2020, dans sa 88e année.

Le vol 609 emmenait les Mancuniens de Belgrade - où ils venaient d’affronter l’Etoile Rouge en quarts de finale retour de la Coupe d’Europe des clubs champions (3-3, après avoir gagné 2-1 à l’aller à Old Trafford), à Manchester, avec escale à Munich. A deux reprises, ce 6 février 1958, l’avion des Mancuniens avait tenté vainement de prendre son envol. La 3e fois, il s’était écrasé en bout de piste enneigé de Munich.

L’UEFA avait invité ManU à l’édition suivante, 1958/59, et le tirage au sort leur avait réservé les Young Boys. Or, la fédération anglaise interdisait la participation à Manchester United, arguant que seul le champion national devait jouer la Coupe des clubs champions... En l’occurrence, les Wolverhampton Wanderers, éliminés sans gloire en huitièmes de finale par Schalke 04.

Qualification malheureuse donc des Young Boys, qui auraient bien voulu que cela se passât autrement. En huitièmes de finale, nouveau coup du sort, ils tombaient de nouveau sur le champion de Hongrie, cette fois le MTK Budapest. Mais les édiles n’ont pas demandé de boycott. YB s’imposait 2-1 à Budapest, puis 4-1 au Wankdorf (3 des 6 buts marqués par Wechselberger). En quarts, le champion de RDA leur donna plus de fil à retordre: après un 2-2 au Wankdorf, 0-0 chez Wismut Aue. YB jouait à 10 dès la 12e minute (blessure de Häuptli), remplacements pas encore admis; la règle des buts marqués à l’extérieur heureusement pas non plus! Il fallait un match d’appui. A Amsterdam, YB se qualifiait (2-1).

La demi-finale face au Stade de Reims allait marquer l’histoire du foot suisse: 60'000 spectateurs au Wankdorf – record d’affluence pour un match en Suisse -probablement à jamais inégalé. Le meilleur buteur de la Coupe du Monde 1958, Just Fontaine (6 matchs, 13 buts en Suède) n’arrivait pas à battre Eich dans la cage bernoise ce 15 avril 1959. Mais presque un mois plus tard – le 13 mai –,au Parc des Princes à Paris, les Rémois s’imposaient 3-0. Walter Eich avait encore les honneurs de la presse française: «Si Eich n’avait pas connu une toute grande journée et n’avait pas réussi au cours de la première mi-temps des parades absolument extraordinaires, il est certain que Reims aurait gagné avec un écart encore beaucoup plus grand.»

A ce jour, seuls le BSC Young Boys et le FC Zurich de Köbi Kuhn (joueur) ont joué des demi-finales des champions. Le FCZ deux fois: en 1964 (1-2, 0-6 contre le Real), en 1977 (1-3, 0-3 contre Liverpool). Ajoutons, la demi-finale de la Coupe UEFA 1979 des Grasshoppers (3-2, 0-1 contre Bastia) et la plus récente, celle du FC Bâle en Europa League 2013 (1-2, 1-3 contre Chelsea). Mais jamais encore de finale de Ligue des Champions avec un club suisse.

YB avait une consolation deux semaines et demie plus tard: le 31 mai, les Bernois s’assuraient leur 3e titre de champion de Suisse consécutif, 3 journées avant la fin du championnat 1958/59: 5-0 contre Urania Genève Sport – et un exploit de «Geni» Meier, également entré dans l’histoire: 4 buts de suite dans la même mi-temps (en l’occurrence la seconde), ce qui est un rarissime «véritable double coup du chapeau» (hattrick 2-0, 3-0, 4-0, hattrick 3-0, 4-0, 5-0), record encore inégalé jusqu’à nos jours.